Contactez Ichtus

L’équipe vous répondra sous peu

Contact

  • Nous suivre :

L’enjeu culturel

Qu’est-ce que la culture ?

Pourquoi, tout simplement, ne pas en demander la définition au dictionnaire ? Celui de Lalande définit la culture comme « le caractère d’une personne instruite et qui a développé par cette instruction son goût, son sens critique et son jugement ».

Roustan ajoute que « le savoir est la condition nécessaire à la culture mais il n’en est pas la condition suffisante et c’est surtout à la qualité de l’esprit que l’on songe quand on prononce le mot de culture, autrement dit à la qualité du jugement et du sentiment d’un homme que l’instruction a perfectionné ».

C’est donc surtout à la qualité de l’esprit que l’on songe quand on prononce le mot de « culture » beaucoup plus qu’à l’érudition. La culture ne consiste pas en une masse de connaissances, elle est une façon d’adapter ces connaissances aux situations concrètes.

Rien n’est plus étranger à la culture que l’abstraction. La vraie culture est vécue, incarnée, c’est une réalité ancrée dans notre héritage; c’est une ambiance, un climat général. C’est une communauté d’être entre les membres et les générations d’un même peuple, l’être et l’esprit d’un peuple.

La misère culturelle aujourd’hui

Or, le climat d’aujourd’hui est au relativisme, à l’individualisme, ce qui signifie, à terme, la mort de la culture. Du reste, tout le monde s’accorde à reconnaître que la culture est en perte de vitesse.

L’école n’assure plus, ou assure mal, la transmission de notre héritage. Philippe Beneton, professeur en sciences politiques à la faculté de Rennes en dresse un constat sévère : « Elle délivre un savoir en miettes, sans ordre, sans repère, sans idée d’excellence ni respect de notre patrimoine… L’enseignement n’a plus à nourrir les âmes, il n’a plus d’autre fonction que la transmission d’un savoir technique (…). Le naufrage des humanités a fait des étudiants d’aujourd’hui des voyageurs sans bagage ». Et il conclut que, faute d’une volonté politique ferme, « l’école continuera à atrophier l’âme de nos enfants, et notre tradition culturelle se réduira à un mince filet d’eau perdu dans le désert » [[« Le Figaro », 24-25 octobre 1987.]].

En l’exprimant différemment, Françoise Giroud fait la même analyse : l’éducation française « panique » les pauvres gens totalement ignorants de toutes les formes d’art, donc incapables de les exprimer. « Musique ? zéro. Culture ? zéro. Architecture ? double zéro. Littérature ? hélas, trois fois hélas ! Les Français ne le savent pas : collectivement, ils sont particulièrement incultes » [[« Le Nouvel Observateur » du 7 août 1987.]].

Et pourtant, la patrie apporte à ses enfants les trésors artistiques, historiques, culturels de son patrimoine et en fait des héritiers riches au moins de cet héritage, ainsi que le souligne si justement Jean Jaurès lorsqu’il dit que « les pauvres n’ont que la patrie ». Mais encore faut-il que les héritiers sachent qu’ils possèdent un héritage et qu’ils connaissent son contenu. Cette transmission de l’héritage se fait, de génération en génération, par le moyen de ces médias éducatifs naturels que sont la famille, l’école, les moeurs, les comportements quotidiens, les spectacles, etc… Si aujourd’hui cette transmission ne se fait plus, ou très mal, d’une façon ponctuelle, il ne faut pas avoir la naïveté d’y voir l’effet du hasard : c’est le fruit d’une guerre culturelle qui est menée depuis quelques décades contre le peuple français et son identité séculaire.

La guerre culturelle

La guerre culturelle est un moyen de domination et de conquête par perversion de l’équilibre culturel de l’adversaire.

Il est vrai que, de tous temps, les affrontements et les conflits militaires entre communautés humaines se sont accompagnés d’actions de dégradation du moral de l’adversaire, tentant soit de démoraliser les combattants eux-mêmes, soit de les couper du soutien moral de la population civile.

Mais la guerre culturelle contemporaine revêt une toute autre ampleur et trouve son efficacité en dehors du choc des armes. Il s’agit d’un moyen de combat spécifique des temps modernes qui agit sur la perception qu’ont les individus du monde et de la société dans laquelle ils vivent, afin de créer des courants d’opinion et d’orienter les comportements individuels et collectifs vers la destructuration interne et le rejet de cette société, pour permettre ainsi l’avènement d’une société nouvelle. Elle se présente donc d’abord comme une guerre civile, même si elle est peut être alimentée ou provoquée par des forces étrangères.

Le but de la guerre culturelle est la conquête pacifique du pouvoir politique par la prise de contrôle des esprits des citoyens. Cette forme de lutte prend aujourd’hui une importance majeure avec le développement des moyens de communication qui démultiplient par leur omniprésence, et notamment à domicile (télévision, radio, audio et vidéo-cassettes, CD, ordinateur, etc…) les possibilités de contrôle des esprits.

Cette pratique de la guerre culturelle, qui développe à présent dans notre société toutes ses conséquences, a son théoricien. Il s’agit d’Antonio Gramsci, fondateur (1921) puis chef du PC italien (1923), mort à quarante-six ans après onze ans de prison et qui inspira d’abord l’action du PC italien, puis la stratégie d’ensemble du communisme international. C’est à lui que nous devons l’énoncé des principes et des méthodes de ce nouveau moyen subversif qu’est la guerre culturelle.

Il s’appuie sur des constatations historiques pour distinguer fondamentalement la société politique de la société civile. La société politique (l’Etat et les institutions) ne peut gouverner durablement sans l’appui de la société civile, constituée de l’ensemble du domaine intellectuel, religieux et moral, c’est-à-dire du domaine culturel. L’Etat, pour gouverner, doit pouvoir s’appuyer sur une conception générale de l’homme et de l’ordre humain, sur une idéologie implicite, sur des valeurs communément admises et considérées comme allant de soi par l’ensemble de la population, ou du moins par la majeure partie de celle-ci.

C’est pourquoi, selon Gramsci qui a fait ce diagnostic dans cette optique, chercher à passer d’une société libérale et humaniste au socialisme, en ne s’intéressant qu’à la conquête de la société politique, est une erreur. Si l’on veut détruire l’Etat « bourgeois », c’est d’abord ses fondements culturels qu’il faut saper. Lorsque la société civile est forte, comme c’est le cas des sociétés occidentales, la prise du pouvoir politique nécessite au préalable la prise du pouvoir idéologique et culturel.

Aussi le passage au socialisme ne se fera-t-il ni par le putsch, ni par l’affrontement direct, ni par la seule conquête de l’Etat et de ses institutions : le passage au socialisme exige la transformation préalable des esprits qui permettra la transformation des rapports sociaux et du modèle de vie quotidienne.

Cette lente subversion des esprits est l’objet même de la guerre culturelle. Allant dans le même sens, Mao Tsé Toung disait que, pour vaincre l’ennemi, une armée au sens classique du mot ne suffisait pas. Il fallait aussi « une armée de la culture » [[Bulletin de l’Association des amitiés franco-chinoises, octobre 1967.]]

Si cette stratégie de prise du pouvoir n’a été précisée qu’au XXème siècle avec le marxisme, le premier exemple de conquête des esprits au service d’une idéologie n’est autre que la Révolution française, véritable entreprise de subversion de la société civile pour détruire l’Ancien Régime. « La révolution était dans les esprits bien avant d’être dans les faits », constate l’historien Jean Tulard. L’importance de la culture avait déjà été perçue et Gramsci s’en est sans doute inspiré : « Dans les sociétés occidentales modernes, il n’y a pas de prise de pouvoir politique possible sans prise préalable du pouvoir idéologique et culturel. La révolution de 1789 est un exemple. Elle n’a été possible que dans la mesure où elle avait été préparée par une « révolution des esprits » ».

Mais avec les théoriciens marxistes, la culture devient en tant que telle une arme de guerre, avec une mise au point très précise de la technique à utiliser qui relève d’une analyse poussée de la psychologie des foules.

La révolution culturelle de Mao Tsé Toung en Chine en est un des exemples les plus frappants.

En France, les événements de mai 68 en sont un autre exemple et constituent, même s’il n’y eut pas prise de pouvoir politique immédiate, un réel succès par une imprégnation lente mais efficace des intelligences, des esprits et des coeurs. Pourtant, le pouvoir politique disposait d’un exécutif fort, d’une majorité absolue au Parlement, d’un chef jouissant d’une popularité exceptionnelle. Tout cela a été néanmoins balayé à long terme parce que le travail de sape visant la société civile n’a pas été entravé, ni même perçu. C’est dire le peu de cas qu’on faisait de la culture : en témoigne le fameux mot prêté au général De Gaulle en 1958 ou en 1960, parlant de la gauche : « Laissons-leur la culture, cela leur fera un os à ronger ».

La guerre culturelle aujourd’hui

Au-delà des exemples historiques, des faits précis, la guerre culturelle est une guerre quotidienne, à la fois intérieure et extérieure.

Une guerre extérieure : jusqu’à l’effondrement du communisme, et par le biais du Parti Communiste français, c’est par la pénétration culturelle que l’Union Soviétique parvenait à désarmer les nations qu’elle voulait coloniser, et surtout les nations occidentales.

Une guerre intérieure puisque le socialisme en France asseoit sa domination idéologique par une main-mise sur la culture.

On imagine qu’arrivée au pouvoir, la gauche a impulsé une « culture de gauche ». Ce n’est pas si simple. En fait, son avant-garde culturelle était là, bien installée et ce par les pouvoirs précédents, car dans l’esprit des hommes dits de « droite » aussi bien dans l’Exécutif ou au Parlement, que dans les rouages administratifs de l’Etat, ou dans les municipalités, la culture était généralement l’affaire de la gauche.

Ce qu’il est convenu d’appeler « la droite » a longtemps considéré la culture comme accessoire (beaucoup continuent de le penser), tandis que la gauche, elle, a perçu très tôt l’importance du combat culturel et a cru à la puissance des idées et à la force de l’esprit.

C’est pourquoi elle a aujourd’hui, en France, le quasi-monopole de la culture. « Depuis 150 ans, la gauche est culturellement au pouvoir », affirmait fort justement M. Louis Mermaz peu après l’arrivée du socialisme au pouvoir [[M. Louis Mermaz , Club de la presse d’Europe l, le 3 juillet 1983.]].

L’un des aspects les plus saillants de l’idéologie de gauche est, en effet, la confusion de la culture avec la politique, la culture étant mise au service de la politique. C’est même pour elle un cheval de bataille : « La seule action que j’entrevois aujourd’hui est une forme d’action culturelle (…). Je crois que l’action culturelle peut ouvrir des possibilités nouvelles à la politisation des consciences, j’y verrais assez bien une propédeutique [[Propédeutique : enseignement préparatoire permettant une formation plus approfondie.]] à l’action politique », expliquait clairement Francis Jeanson [[Francis Jeanson, intellectuel sartrien. In « Profil-Bourgogne », du 15 mai 1967.]], en 1967.

Tandis que François Mitterrand affirmait, en 1981, lors de la campagne pour les élections législatives : « La révolution socialiste n’en restera qu’aux balbutiements tant qu’elle ne connaîtra pas de prolongement culturel. (…) Le socialisme est d’abord un projet culturel ».

Quant à Jack Lang, qui prétendait amener « la lumière après les ténèbres », il n’hésitait pas à déclarer : « Le gouvernement ne compte pas un ministre mais quarante-quatre ministres de la culture, car culturelle est l’abolition de la peine de mort, culturelle la réduction du temps de travail, culturelle la reconnaissance des droits des travailleurs, l’affirmation des droits de la femme »…

Catherine Clément, ancien journaliste au « Nouvel Observateur », conseillère philosophique auprès du ministère de la culture et auteur de « Rêver chacun pour l’autre », soulignait pour sa part que : « Parler de la politique, c’est ne rien oublier de la question de la culture ».

Et la litanie pourrait se poursuivre à l’infini, en variant le ton : avec Jacques Attali, proclamant à qui veut l’entendre que « notre projet est culturel », avec Henri Krasucki considérant la culture comme « un élément fondamental de la lutte générale pour transformer la société… », etc…

Ainsi la primauté du culturel a-t-elle été maintes fois affirmée par la gauche. Mais ce n’est pas tout de vouloir établir un monopole sur la culture, encore faut-il y parvenir. Elle y est parvenue et la culture est bel et bien entre ses mains, avec l’étrange complicité des hommes de droite. Car la droite a laissé faire, sans prendre conscience que la culture n’était pas seulement de l’ordre du savoir, des arts, des loisirs…

« La gauche, constate Christian Langlois, membre de l’Institut, a été aidée dans son entreprise par la fascination qu’ont exercée l’économie et la technique sur une droite qui n’a vu dans l’art qu’un divertissement sans portée politique ».

Jean Anouilh insiste avec férocité [[« Le Figaro-Magazine » du 3-03-1986.]] : « Que voulez-vous, les gaullistes voulaient faire de l’argent dans l’immobilier. Ils ont laissé la culture à la gauche pensant que ça ne prêterait pas à conséquence ».

A présent, ce diagnostic est reconnu de tous : la question de l’économie et la conduite des affaires sont considérées comme la chose de la droite, tandis que le pouvoir culturel, l’imprégnation des mentalités et l’organisation de notre environnement moral et intellectuel tombent dans l’escarcelle de la gauche.

Celle-ci a détourné l’art et la culture de leurs fonctions traditionnelles pour imposer son hégémonie idéologique. Elle a mis la culture au service de sa conception du monde.

Ancien ministre des Affaires culturelles, Maurice Druon, dans son ouvrage « Vouloir la France », dénonce ce phénomène d’invasion du domaine culturel par un pouvoir à tendance totalitaire, qui l’a utilisé au service de sa propre idéologie.

Marc Fumaroli, auteur de « L’Etat culturel » et qui n’est pas précisément un homme de droite, remarque quant à lui que la culture est devenue « l’autre nom de la propagande ».

« La gauche domine une maison de la culture et en fait une plateforme de lancement de ses missiles politiques », ironisait tristement Dominique Jamet dans « Le Quotidien de Paris » du 6 juillet 1986, rejoint en cela par Jean-Edern Hallier pour lequel « le ministère de la culture doit cesser d’être une officine de propagande gouvernementale » [[Jean-Edern Hallier, « Le Figaro » du 5 mai 1993 : « Culture : l’exemple français ».]].

Michel Giraud [[Président du Conseil régional d’Ile-de-France, président de l’association des maires de France.]], qui fut sénateur et maire du Perreux, dans son livre « Nous tous, la France » (1984) observe que notre pays était entré depuis longtemps dans le socialisme sans s’en apercevoir par le truchement d’une mainmise culturelle sur les esprits et dénonce l’utilisation de la culture par la gauche à des fins politiques.

Dans un tel contexte et devant une telle entreprise de subversion, on peut s’étonner qu’aussi peu de gens se soucient de cette guerre culturelle et qu’il n’y ait pas plus de voix pour la dénoncer…

C’est qu’en fait, la guerre culturelle se fait à visage masqué par la diffusion et l’entretien d’un état d’esprit, d’un climat ambiant : « Il y a plusieurs manières de détruire les racines culturelles d’un peuple, écrit le recteur Yves Durand dans son livre « L’enjeu éducatif », la manière brutale du maoïsme triomphant au moment de la révolution culturelle des gardes rouges et celle, plus insidieuse, sans doute plus efficace, de la lente subversion qu’a connue l’Occident ».

Nous sommes confrontés beaucoup moins à des erreurs explicitement formulées, disait Jean Ousset, qu’à un climat, une ambiance, un environnement culturel qui, subrepticement, imposent un langage, des comportements, des moeurs. Par l’intermédiaire des médias, par une vision falsifiée de l’Histoire, par le théâtre, la danse, la musique, les Beaux-Arts… la gauche est parvenue à séduire beaucoup de ceux qui n’avaient pas adhéré à l’idéologie socialiste. Ce n’est pas en parlant de politique, de sociologie ou d’économie qu’elle les a conquis, mais en les faisant baigner dans un certain climat culturel.

Régis Debray, ancien compagnon de Che Guevara, conseiller de François Mitterrand en 1989, ne disait-il pas que « Le chant de l’Internationale a fait plus de communistes que Karl Marx » ?

Les moyens de la guerre culturelle

La méthode essentielle de cette guerre culturelle qui est aujourd’hui menée contre la France afin de la modifier dans son essence même, c’est la dialectisation du patrimoine.

Faire naître et entretenir « la contradiction dans l’essence même des choses » , telle est la dynamique imaginée par Marx et systématisée par Lénine afin de transformer toute évolution naturelle des choses en un tremplin révolutionnaire. Elle consiste à faire surgir, en toute situation sociale, deux fronts qui s’opposent et par leur contradiction font le jeu de la Révolution : serfs contre seigneurs, bourgeois contre aristocrates, pauvres contre riches, noirs contre blancs, droite contre gauche, prolétaires contre possédants, jeunes contre vieux, intégristes contre progressistes… mécanique indéfiniment renouvelable puisqu’elle puise sa dynamique dans l’imperfection humaine.

L’Histoire est le terrain de prédilection de la dialectisation de la culture; elle n’est plus considérée comme la continuité d’un patrimoine qu’il s’agit d’enrichir à chaque génération et de purger de ses mauvaises habitudes, mais comme l’histoire de la lutte des classes.

Le « Manifeste du Parti Communiste » de Karl Marx (1848) commence ainsi : « L’histoire de l’humanité de l’origine à nos jours n’est que l’histoire de la lutte des classes ». Ce qui intéressait Marx dans cette affirmation péremptoire qui s’est révélée totalement fausse à l’examen des faits, ce n’était pas sa vérité historique mais son extraordinaire puissance de mobilisation et de transformation de la haine en moteur subversif. C’est ce que soulignait déjà l’historien Fustel de Coulanges (1830-1889) : « L’histoire est ainsi devenue chez nous une sorte de guerre civile en permanence. Ce qu’elle nous a appris, c’est surtout à nous haïr les uns les autres (…). Le véritable patriotisme, c’est l’amour du pays, c’est le respect pour les générations qui nous ont précédés. Nos historiens ne nous apprennent qu’à les maudire et ne nous recommandent que de ne pas leur ressembler. Ils brisent la tradition française et ils s’imaginent qu’il restera un patriotisme français (…). Nous nourrissons au fond de notre âme une sorte de haine inconsciente à l’égard de nous-mêmes ».

Longtemps on a dressé, et l’enseignement officiel se charge de le diffuser largement, un tableau très noir de l’Ancien Régime présenté comme la tyrannie des rois tout-puissants envers leurs sujets maltraités et asservis; alors que la Révolution française était considérée comme le point de départ d’une nouvelle époque qui verrait l’âge d’or de l’Humanité grâce à la philosophie des Lumières, et aux principes de « liberté, égalité, fraternité »… Avec les travaux de sommités comme les professeurs Furet, Chaunu, Bluche ou Tulard, l’Université française a presque totalement abandonné cette vision manichéenne et erronée de la France d’avant 1789, mais celle-ci continue de s’imposer au sein du grand public par le biais des manuels d’enseignement primaire et secondaire, de la télévision et de tous les médias culturels.

Le phénomène est le même concernant la dévalarisation du Moyen-Age et par là-même du christianisme qui imprègnait alors la société tout entière. Bien que de grands historiens comme Jacques Heers (« Le Moyen-Age, une imposture ») ou Régine Pernoud ( » Pour en finir avec le Moyen Age ») aient fait la preuve que ces siècles de grande chrétienté ne furent pas les temps obscurs que l’on imagine, la « légende noire » des siècles précédant la « Renaissance » avec son cortège de clichés erronés est toujours admise par la grande majorité de nos concitoyens.

Mais l’Histoire n’est pas le seul vecteur utilisé pour cette entreprise de déstabilisation culturelle. Les Beaux-Arts témoignent de l’existence de la même volonté de rupture. Ainsi l’art classique est-il assimilé à l’art bourgeois, caractérisé par une imitation servile de la nature : il représenterait la stérilité de la tradition par opposition à l’art moderne, dynamique, soucieux de nouveauté, privilégiant l’imagination, l’expression du « moi » de l’artiste !… On connaît le discours.

Cette culture révolutionnaire se pose en s’opposant, elle se caractérise par le refus de tout ce qui l’a précédée, par une volonté essentielle de changement pour le changement.

Ainsi la guerre culturelle s’attache-t-elle à dévaloriser le passé : « c’est en vilipendant le passé qu’on se figure aller de l’avant » remarquait Soljenitsyne [[Soljenitsyne, « Le Figaro » du 5 avril 1993 : « La culture en crise ».]].

Le monde nouveau que cette immense entreprise de subversion culturelle tente de promouvoir n’est que « la négation persévérante, systématique et haineuse de l’ancien » [[Marc Fumaroli, in « L’Etat Culturel ».]], ainsi que l’écrit Marc Fumaroli.

Bien d’autres moyens, moins importants mais tout aussi insidieux, sont également utilisés, tel que l’emploi d’un vocabulaire perverti. Claude Levi-Strauss disait que l’homme était un locuteur et que les mots qu’il employait déterminaient pour une bonne part son comportement. Ce qui signifie que trahir le vocabulaire détourne la pensée et fausse l’esprit. « Les mots interdits de poésie et de passion ne servent plus à qualifier le réel mais à le travestir et à le vider de toute présence et de toute substance morale » [[Charles Rambaud, « Permanences », n° 300.]].

Pourquoi s’étonner dans ces conditions que notre société soit divisée, que les solidarités anciennes s’effritent, que la solitude, la perte du sens de l’identité et le désespoir qui s’ensuit soient devenus des caractéristiques de cette fin de millénaire dans les sociétés occidentales ?

Conséquences de la guerre culturelle

L’apparition d’une sous-culture

La culture, autrefois hiérarchie de valeurs et de goûts, jalonnée de chefs-d’oeuvre consacrés, est aujourd’hui devenue un bazar : les idées de hiérarchie ou de valeur en sont explicitement exclues. Marc Fumaroli parle d’une culture « qui peut du même souffle désigner Platon et Coluche ».

Alain Finkielkraut fustige cette conception de la culture : « Si vous vous entêtez à maintenir une hiérarchie sévère des valeurs, (…) s’il vous est impossible de couvrir de la même étiquette culturelle l’auteur des Essais et un empereur de la télévision (…), si vous ne voulez pas mettre un signe d’égalité entre Beethoven et Bob Marley, c’est que… vous partagez avec les racistes la phobie des mélanges et la pratique de la discrimination » [[« Courrier de Pierre Debray » du 29 avril 1991.]].

La sous-culture actuelle exalte le culte de l’incertitude, de la tolérance à tout va… Henri Bonnier souligne justement qu’ »avec la révolution socialiste, le culturel devient un fourre-tout indescriptible, un bric-à-brac de ferrailleur offrant à sa clientèle tout ce que le hasard a fait échouer chez lui » [[Henri Bonnier, « Lettre recommandée à Jack Lang et aux fossoyeurs de la culture », 1993.]].

Pour donner un semblant d’assise à ce fatras culturel, on invoque à tout propos la modernité. Le seul critère aujourd’hui retenu est celui de la nouveauté, ce que Soljenitsyne [[« Le Figaro » du 5 avril 1993.]] appelle « un avant-gardisme à tout prix », « une chasse indigeste à la nouveauté des formes, considérée comme le but essentiel ». Derrière ce culte de la nouveauté, « se cache la subversion tenace et qui va loin, la dérision et le renversement de tous les commandements moraux ».

Faut-il y voir une sorte de démocratisation de la culture qui la rendrait accessible à tous ? C’est en tous cas le prétexte avancé pour justifier cette absence de hiérarchie et de valeurs. Mais cette façon de ne pas placer la barre trop haut revient, dans les faits, à un nivellement par le bas car l’idée d’un partage égalitaire de la culture est une abstraction. Le résultat de cette démagogie est un déclin de la culture générale.

On aboutit à « cette culture de confection dont on nourrit les hommes d’aujourd’hui comme on nourrit les boeufs en foin » que dénonce Saint-Exupéry, dans sa « Lettre au général X ». C’est une comparaison qui va très loin : la sous-culture qui fait l’apologie de l’incompétence, de la négligence, du sabotage, conduit à une décadence de l’homme par perte totale des convictions et uniformisation de la pensée… Et cela d’autant plus que nous sommes dans une civilisation de l’image qui agit directement sur la sensibilité avec tout un poids de crédibilité presque irréfutable, sans passer par le crible de l’intelligence [[Voir à ce sujet la remarquable étude de Charles Rambaud : « Comme des images », « Permanences » n° 327, décembre 1995.]].
Le déracinement

La seconde conséquence de cette guerre culturelle est un corollaire de la première : le déracinement de l’homme, qui devient la proie du totalitarisme, ainsi que ne craint pas de l’écrire Jean-Marie Benoist : « la désorientation culturelle apportée par le sabotage de l’enseignement, des matières de culture telles que l’histoire, la géographie, la philosophie ou les humanités, est le premier et redoutable degré qui mène aux conditionnements totalitaires » [[Jean-Marie Benoist, in « La génération sacrifiée ».]].

On retrouve la même idée chez Paul Guth, dans sa « Lettre ouverte aux futurs illettrés » : « En pays totalitaire, quand on veut qu’une ère nouvelle s’ouvre dès l’an I d’une révolution, on supprime des pans entiers de l’histoire dans les manuels et les annales. On extrait les faits et les héros de la mémoire collective comme s’ils n’avaient jamais existé. Ainsi a-t-on procédé, non dans un pays lointain (…), mais au jardin de la France ».
La déchristianisation

Bien évidemment ce climat culturel entrave l’éclosion de la foi : notre culture est dépréciée; or le contenu de notre culture est essentiellement catholique. La dévalorisation de notre passé conduit à un rejet de ce qui est au coeur même de ce passé : la religion. L’effondrement culturel va de paire avec l’effondrement spirituel puisque le christianisme est une religion historique, une incarnation.

« C’est un spectacle vertigineux pour un historien que de voir divorcer si rapidement une nation et une religion qui avaient partie liée depuis Clovis au moins » déplore Alain Besançon [[Alain Besançon, « L’Express » du 28 août 1987.]].

Les troupes de la guerre culturelle

Qui mène la guerre culturelle ? Elle se fait à visage masqué et, exception faite d’un très petit nombre d’initiés formés à la pratique de la dialectique, l’essentiel des troupes de la subversion culturelle sont des acteurs inconscients car manipulés. Ils sont mobilisés pour des causes qui apparaissent comme généreuses : la paix, l’égalité des chances, la tolérance, la liberté d’expression, les droits de l’homme, etc…

Quant au petit nombre d’initiés ou de professionnels de la subversion, on le trouve au ministère de la culture, mais aussi dans les mouvements politiques, les syndicats, les forces occultes (franc-maçonnerie), les médias…

Il faut aussi, dans la responsabilité qui incombe à certains groupes en particulier faire une place de choix aux « artistes » ou du moins à ceux qui sont considérés comme tels. Soljenitsyne montre qu’en Russie la révolution, avant d’exploser dans les rues de Pétrograd, avait jailli dans les revues artistico-littéraires de la bohême petersbourgeoise. Les artistes, en appelant à la rupture, au renversement de l’ensemble de la culture traditionnelle antérieure, n’ébranlent pas seulement la culture mais la vie même de la société.

De ce point de vue, ils sont les initiateurs de la guerre culturelle.

En France, le surréalisme a joué un rôle considérable et délibéré dans cette guerre. On le présente à tort comme une révolution uniquement littéraire et artistique. Créé en 1924 par André Breton, il n’est pas d’abord un mouvement artistique, il se donne pour objectif de « changer la vie », et il tend « de toutes ses forces à l’accomplissement de la révolution » (Tzara). Il eut l’idée d’utiliser l’art pour parvenir à ses fins. A travers lui, il entend « miner les digues mentales édifiées pendant vingt siècles de civilisation occidentale et chrétienne ».

Par l’emprise qu’il eut sur le monde intellectuel et le succès qu’il rencontra, le surréalisme fut l’un des vecteurs de diffusion les plus importants de ce climat culturel relativiste et destructeur… Et ce d’autant plus que les « leaders » surréalistes, tels Eluard ou Aragon, avaient un talent incontestable.

Les surréalistes n’ont jamais caché le but de leur entreprise, mais on le fair à leur place. Croyez-vous que les professeurs ou les livres scolaires les présentent comme des serviteurs de la révolution ?

Pourtant c’est volontairement qu’ils ont été des meneurs de la guerre culturelle; Picasso par exemple était très conscient de l’impact révolutionnaire de son travail.

Mais ce n’est pas le cas pour la majorité de la population. C’est l’élite qui donne le ton, séduit, et les gens suivent sans toujours prendre la mesure de ce qu’ils font. Très souvent, c’est parmi les intellectuels, les écrivains, les peintres… que cette élite se manifeste. Mao TséToung ne voulait-il pas « faire en sorte que la littérature et l’art s’intègrent parfaitement dans le mécanisme général de la Révolution ? » [[In Bulletin de l’Association des amitiés franco-chinoises – octobre 1967.]].

En somme, la culture est devenue un moyen : elle est une arme de guerre utilisée pour faire triompher la Révolution. Et cette culture est une culture de ruptures, de divisions, de haine. Or, Louis Pauwels l’avait fort bien dit, dans un éditorial du « Figaro-Magazine » [[« Figaro-Magazine » du 3 avril 1982.]] : « On ne fait pas durer une nation avec des ressentiments et des haines de classes ».

Cette remarque est très importante… Elle signifie d’abord que nous disparaîtrons en tant que nation si la guerre culturelle continue d’exercer ses ravages et si nous la laissons poursuivre son entreprise de subversion.

Elle signifie également… qu’il nous faut contre-attaquer, montrer qu’une nation se caractérise par quelque chose de plus fort que la lutte des classes : l’amour social.

Or, celui-ci n’existera que si nous restaurons une culture authentique.

La culture authentique : réservoir d’une contre-attaque

Puisque nous sommes en guerre, et que cette guerre est culturelle, notre arme principale sera nécessairement la culture.

La renaissance de la nation, la renaissance française se fera par la culture. Un redressement politique, pour important qu’il soit, serait voué à l’échec s’il n’était pas soutenu par une action culturelle suffisante : ce qui fit, par exemple, la fragilité des deux restaurations (1815 et 1830), c’est l’oubli de cette vérité fondamentale. Parce que tout ce qu’elles représentaient fut éclipsé par l’action culturelle du courant romantique, révolutionnaire, libéral, qui enfièvra le monde entier à cette époque.

Mais attention : s’il est de notre devoir de conquérir le pouvoir culturel, ce n’est certainement pas pour substituer un contenu idéologique de « droite » à un contenu idéologique de « gauche ». La culture ne doit pas être au service d’une ambition partisane : c’est une des pires formes de la révolution que de s’en servir pour établir son hégémonie sur la société.

A ce propos, Christian Langlois écrit très justement : « Il ne s’agit pas de remplacer un artiste de gauche par un artiste de droite, il s’agit d’aider de toutes nos forces et dans tous les domaines ceux qui travaillent à procurer aux hommes cette beauté sans laquelle ils ne peuvent vivre ».

De fait, notre action culturelle ne saurait consister à remplacer un contenu idéologique par un autre; il s’agit au contraire de proposer une autre conception de l’art et de la culture, fondée effectivement sur la beauté. C’est d’un tout autre niveau. Jean-Edern Hallier, dans son article « Culture : l’exemple français » [[« Le Figaro » du 5 mai 1993.]], en résumait l’esprit en disant : « Il ne s’agit plus de se servir de la culture, mais de la servir ».

Contenu et finalités de la culture

Son contenu

La culture est d’abord un héritage, et notre culture française est l’héritière de trois mères-patries : Athènes – Rome – Jérusalem.

Ce qui signifie que notre culture prend sa source à Athènes, à Rome et à Jérusalem. Parce qu’elle a hérité de l’harmonie grecque (Athènes est mère de la raison humaine et de la parfaite beauté naturelle), du droit romain (qui corrige l’excès d’individualisme dont la Grèce mourra et apporte le sens de l’Etat), et sur cet héritage païen est venu se greffer le christianisme. Notre culture est constituée par l’héritage grec, l’héritage romain et l’héritage chrétien.

Et cet héritage se traduit aussi bien dans la langue que dans l’histoire, les arts, les moeurs, par un certain tour d’esprit,… La culture est un tout.

Issue de ce triple héritage, notre culture est bâtie sur quatre piliers, qui en sont à la fois les caractères essentiels et les grands mobiles d’action : l’amour de la beauté, le besoin de justice, la passion de la liberté, et le goût de la vérité.

Nous sommes très loin ici de cette « culture de confection » dont parlait Saint-Exupéry et dont nous sommes matraqués aujourd’hui. Loin de déraciner l’homme et de désagréger la société, cette culture authentique les enrichit.
Ses finalités

Le rôle de la culture est de disposer l’homme à deux perfections : la perfection personnelle et la perfection sociale.
– Perfection personnelle, car la culture contribue à l’épanouissement de l’homme, à son approfondissement. Parce qu’elle répond aux questions fondamentales que l’homme se pose, parce qu’elle forme le jugement, éduque le goût …

« La culture, c’est ce qui répond à l’homme quand il se demande ce qu’il fait sur la terre », disait André Malraux. Ce qui signifie que notre patrimoine est un arsenal inépuisable dans lequel sont contenues toutes nos raisons de vivre et de nous battre. C’est dans ce sens qu’il faut interpréter la formule d’Henri Hude . : « La culture est la croissance et l’éducation de ce qu’il y a d’humain dans l’homme » [[Henri Hude, « Ethique et politique » – 1992.]]. Elle a un rôle éducateur et formateur. Maurice Druon a, à ce propos, un mot très juste : « L’Etat n’a pas à modeler l’homme, mais à faire qu’il puisse se modeler par la culture ». La culture permet à l’homme de s’élever.
– Perfection sociale, également, parce que les hommes communient par la culture à un ensemble de valeurs, de sentiments, de comportements, et sont unis par une admiration et un amour communs pour les chefs-d’oeuvre, de toutes natures, de leur patrimoine. La culture est un lien social.

Ceci est fondamental, et explique que la culture soit au centre de notre combat.

Une renaissance par la culture

Nourriture de l’esprit et du coeur, ciment social, la culture est le moyen privilégié d’une renaissance nationale.
La culture, seul lien social possible.

Pour travailler à la renaissance d’un peuple, il est nécessaire de trouver ce qui peut favoriser le « nous commun ».

Le peuple français est aujourd’hui déraciné, coupé de ses élites, en état de guerre culturelle, et donc profondément divisé. Notre époque manifeste sa stérilité et son impuissance en ce qu’elle est le temps de la solitude de l’homme dans une société éclatée. Or, l’homme a besoin de communion. Jamais sans doute il n’a autant exprimé cette soif de communion. Quand Camus, à la fin de la seconde guerre mondiale, disait à Paul Eluard : « Mais enfin, Eluard, comment toi, un poète, as-tu pu adhérer au Parti Communiste, cette poubelle de toutes les espérances déçues ? », ce dernier répondait : « Que veux-tu, mon vieux, j’ai besoin de communion ! ».

Le grand problème aujourd’hui est de savoir où trouver, si ce n’est une union ou une unité, du moins une possibilité de rencontre, un minimum de société au sens élémentaire du terme, sans qu’il soit besoin d’être systématiquement adversaire ?

Le seul lien qui existe, qui ait déjà existé et donc fait ses preuves par l’histoire, qui soit une référence et une réalité, est le patrimoine culturel français. Ce patrimoine que nous regardons comme des antiquaires, des archéologues, ou des érudits, ou que nous ne regardons même plus du tout pour la majorité d’entre nous, est un arsenal inépuisable, la réserve d’une authentique contre-attaque, et la source d’une réelle espérance.

Cette possibilité de communion, d’union avec ceux qui nous ont précédés, ceux qui vivent aujourd’hui, et ceux qui vivront demain au coeur de la même patrie, est une richesse incommensurable dont nous n’avons pas suffisamment conscience.

Et pourtant si la culture est au centre de tous les enjeux, c’est bien parce que la reconstruction d’un pays passe par la reconstruction de son unité. Et que la reconstruction de son unité passe par la connaissance et l’amour de l’héritage culturel : « L’histoire de toute l’humanité est autant, sinon plus que celle des tensions entre les hommes, l’histoire des fidélités et des solidarités qui les unissent les uns aux autres », affirmait le Recteur Yves Durand [[Recteur Yves Durand, « Classes, luttes et luttes des classes », Ed. CLC, 1982, 40 f.]]. Alors que la guerre culturelle s’acharne à diviser les hommes, à déchirer le tissu social, à ne faire de l’Histoire qu’une lutte des classes, notre action culturelle vise à retrouver le coeur de l’harmonie française.

« On ne vit pas que de livres et de haine. On ne meurt pas toujours les armes à la main. Il y a l’histoire et il y a autre chose, le simple bonheur, la passion des êtres, la beauté naturelle », faisait remarquer Albert Camus. Face à la culture de mort exaltée par tous ceux qui tentent de démontrer que la lutte des différentes classes sous-tend la vie nationale, il faut affirmer, avec Aristote, et savoir expliciter que « l’amour est le lien qui unit la cité ».
Le respect de l’héritage

Pour que le patrimoine culturel crée véritablement des liens entre les membres d’une même nation, il faut que l’ensemble de ce patrimoine soit respecté. Nous sommes, en naissant, des héritiers, et nous héritons tous du même passé, que nous le voulions ou non. Nous sommes les fils d’un même peuple. Il faut donc accepter cet héritage, même si l’on doit porter une partie de cet héritage comme un péché, comme une souffrance, comme un mal.

Car toute une part de cet héritage, qui n’était pas conforme aux grandes aspirations de 1789, est devenue psychologiquement irrecevable : c’est tout l’Ancien Régime, soit plus de mille ans de notre histoire, qui est déprécié et caricaturé. On passe sous silence tous les aspects positifs de la période pour n’en retenir que les aspects négatifs.

Ainsi, le citoyen, qui se définit comme « celui qui prend conscience d’appartenir à une communauté » (les autres, qui n’ont que leur carte d’électeur, ne sont que des habitants) [[Voir à ce sujet la vidéo-cassette n° 23 : « Le citoyen et l’habitant » de Jacques Trémolet de Villers.]] n’appartient plus à la communauté naturelle qui est le « nous de l’héritage », il appartient à une communauté idéologique. C’est une démarche parfaitement révolutionnaire. Songez à l’ »Internationale » : « Du passé, faisons table rase ».

La démarche qui permettra de reconstruire notre communauté nationale est radicalement le contraire de l’attitude subversive car, ainsi que le fait remarquer Simone Weil, « l’opposition entre l’avenir et le passé est absurde. L’avenir ne nous apporte rien, ne nous donne rien : c’est nous qui, pour le construire, devons tout lui donner, lui donner notre vie elle-même. Mais pour donner il faut posséder et nous ne possédons d’autre vie, d’autre rêve que les trésors hérités du passé » [[Simone Weil, in « L’enracinement ».]]. Ce que confirmait Chateaubriand en disant : « Gardons-nous d’ébranler les colonnes du temple (c’est-à-dire les fondements de notre civilisation), on peut abattre sur soi l’avenir ».

Le respect et l’amour du passé, qui n’interdisent ni les préférences personnelles ni le regard critique, doivent donc conduire notre action culturelle. L’historien Pierre Chaunu va jusqu’à parler de « la passion d’un passé, aussi vrai que l’aujourd’hui de ce jour, qui pétrit notre vie et commande notre avenir ». Tandis qu’Auguste Rodin nous interpellait ainsi : « Aimez dévotement ceux qui vous ont précédés. L’admiration est un vin généreux pour les nobles esprits ».

Un patrimoine immense et aimable

Nous serions d’autant plus inexcusables de ne pas manifester un véritable amour envers notre héritage, que le patrimoine culturel français est infiniment riche et aimable.

Cette affirmation n’est pas le fruit d’un chauvinisme aveugle et partial. Contrairement à l’idée galvaudée, qui veut que tout soit à mettre sur le même plan, il existe objectivement une hiérarchie des cultures selon qu’elles respectent plus ou moins l’ordre naturel.

Il n’est pas difficile de montrer, simplement en la comparant, que la culture française est l’une des expressions les plus concrètes et les plus riches de cet ordre naturel. Le savant hollandais Grotius est allé jusqu’à dire à Louis XIII que la France était « le plus beau royaume après celui du ciel ». Sans soutenir absolument cette affirmation, qui ne peut que toucher notre piété nationale, on peut néanmoins affirmer avec Charles Maurras, que « naître en France (…) alors même qu’on y procède du dernier des déshérités, c’est encore naître possesseur d’un capital immense et d’un privilège sacré » [[Charles Maurras, « Dictionnaire politique et critique ».]].

Notre héritage français est si considérable qu’un Pierre Chaunu a pu écrire : « Nous amoindrir, c’est amoindrir le patrimoine de l’humanité ».

Et Marie-Joelle Guillaume en donne l’explication : « Modelée en effet par les trois capitales, Jérusalem, Athènes et Rome, dont l’alliance spirituelle forme une pensée à la fois unique au monde et universelle, la France a, dès l’origine de son histoire, porté au plus haut point en Europe l’harmonie souveraine entre la raison et la foi, la contemplation et l’action, la liberté humaine et le respect de Dieu qui fit l’originalité de la civilisation chrétienne (…) Par l’exemple donné, elle fut bien « l’éducatrice des peuples » ». [[Marie-Joëlle Guillaume, journaliste, agrégée de lettres classiques, in « Europe, valeurs et espérances », en vente au CLC, 50 f.]].

L’esprit de notre combat

Allons-nous nous montrer dignes d’un tel héritage ? Autrement dit, par quels moyens pouvons-nous faire redécouvrir le patrimoine français à nos compatriotes ?

Une remarque au préalable : il va de soi que l’action culturelle telle que nous l’entendons ne saurait être conduite au seul niveau de l’Etat. La culture n’est en rien l’émanation de l’Etat. Elle trouve sa filiation dans la société car elle transmet l’héritage et constitue le témoignage de la fécondité d’un peuple.

Ce qui ne signifie pas que l’Etat doive se désintéresser de la culture; il doit lui donner les moyens d’agir comme facteur de cohésion nationale. C’est pourquoi il n’est pas sain que seuls les courants travaillant à la rupture sociale puissent bénéficier aujourd’hui d’une diffusion officielle.

L’action culturelle concerne chacun d’entre nous. Il faut donc limiter l’Etat à ce qui relève de ses réelles attributions et nous occuper de tout le reste. Aujourd’hui, l’action culturelle se mène de personne à personne. La contre-révolution est d’abord personnelle : « il n’est de richesses que d’hommes », la célèbre formule de Jean Bodin est plus que jamais actuelle. Encore faut-il savoir s’y prendre et faire preuve d’habileté.

Pas d’hypertrophie doctrinale

Il faut bien se rendre compte que l’énoncé des vérités purement doctrinales rebute beaucoup de nos contemporains, que les motivations d’une partie importante d’entre eux ne sont pas d’abord doctrinales, qu’ils n’ont pas prioritairement un souci de cohérence intellectuelle ou de synthèse doctrinale, mais une soif d’harmonie sociale, un profond désir de fraternelle convivialité, de relations pacifiques avec les autres, d’amour dans la cité en somme.

Cela ne veut pas dire qu’il faille délaisser la formation doctrinale : elle n’a pas cessé d’être et elle doit rester l’irréductible fondement de notre entreprise. La formation doctrinale, c’est évidemment la doctrine sociale de l’Eglise qui s’adresse aux croyants et aux incroyants parce qu’elle repose en premier lieu sur la loi naturelle, sur l’existence d’un droit naturel.

Jean Ousset affirmait qu’il faut « donner à la doctrine un caractère irremplaçable de bienfaisant squelette, de bienfaisante ossature intellectuelle mais ne pas se masquer son aspect rébarbatif ». Il ne faut pas avoir recours à des développements trop désincarnés mais utiliser le langage des images, de la musique, en puisant dans le trésor de la culture.

« Le combat idéologique est très bavard, il faut sans cesse expliquer et savoir parler. C’est là que vient à votre secours l’arsenal culturel. Vous ne parlez plus, vous récitez un poème.Vous ne parlez plus, vous écoutez une musique. Vous ne parlez plus, vous montrez une image (…). Ce qui ferait du bien à nos contemporains, ce qu’ils aimeraient entendre, le parler vrai, le parler concret, le parler imagé qui plaît, ce qui en même temps fait chaud au coeur, se trouve dans l’arsenal inépuisable du trésor culturel » [[Jacques Trémolet de Villers, conférence de clôture du congrès ICTUS de 1989.]].

On retrouve exactement cette idée chez Gustave Lanjon qui écrit dans « L’art et la prose » : « Parce que l’homme n’est pas un pur esprit, la pensée abstraite a tôt fait de le fatiguer; tandis qu’en touchant ses yeux par des images, ses oreilles par des harmonies, on lui agrée. On lui fait agréer du même coup les idées qu’on exprime. La couleur et le son font passer le sens avec eux ».

Cette méthode, non seulement séduit et convainc, mais en plus :
– elle permettra, d’une part, de montrer que ce que nous proposons n’est pas une idéologie. Or, il est psychologiquement très difficile de le faire admettre. Nos contemporains sont si lassés par le chaos, les heurts, les contradictions de la pensée moderne qu’ils la rejettent avec l’intuition confuse qu’elle ne correspond plus à leurs aspirations et n’est pas capable de résoudre leurs problèmes. C’est l’attitude de la génération actuelle qui refuse de « se laisser endoctriner ».

Raison de plus pour être extrêmement prudents sur la manière avec laquelle nous faisons passer le vrai; il faut nous acharner à montrer les choses et leur enracinement et éviter de les affirmer abstraitement. Ayons la discipline de ne pas jouer aux intellectuels. Il faut à tout prix éviter l’érudition pour l’érudition et plus encore la pédanterie.

Mais pas d’indigence non plus. Un travail important personnel s’impose, c’est évident, mais dans le domaine culturel notre tâche consiste à mettre à la portée du plus grand nombre les richesses de notre patrimoine et non pas à se gargariser d’une érudition dans laquelle il se noierait.
– d’autre part, l’expérience prouve tous les jours qu’une hypertrophie doctrinale peut fort bien s’allier à une ignorance profonde des réalités concrètes de la vie et des exigences de l’action. « Il y a et il y aura toujours beaucoup plus de choses au ciel et sur la terre que dans le plus beau système de philosophie » (Shakespeare).

Gustave Thibon, pour sa part, souligne à plusieurs reprises que si les intellectuels du XXème siècle se sont trompés pour la plupart, c’est parce qu’il y a chez eux un contraste tragique entre des connaissances surabondantes (ils savent tout) et l’infantilisme ou l’irréalisme de l’âme : ils savent tout mais ils ne savent que ça, c’est à dire qu’ils ne confirment pas leurs connaissances par l’expérience, ils n’incarnent pas leur savoir, ils ne le vivent pas. Et de citer Paul Valéry pour souligner que cette attitude est beaucoup plus dangereuse qu’on ne l’imagine : « Rien ne mène plus sûrement à la parfaite barbarie qu’un attachement à l’esprit pur ».
Faire preuve d’enthousiasme, d’ouverture aux autres

« Aujourd’hui comme au temps de Sophocle, le cri d’Antigone : « Je ne suis pas née pour partager la haine mais l’amour », demeure la toute première maxime du salut politique et social. Car, disait La Bruyère : « L’on est sociable et d’un meilleur commerce par le coeur plutôt que par l’esprit » », ainsi que le rappelait volontiers Jean Ousset.

Qui trouvait un écho immédiat chez Charles Rambaud : « Dans le monde tel qu’il est, nous ne serons pas contagieux par raison démonstrative mais par amour et quand ce que nous défendons apparaîtra comme des enfants de l’amour et non des enfants de la morale ou de l’idéologie ».
La méthode des recoupements et le sociabilisme

Pour y parvenir, pour être ces enfants de l’amour, il faut se montrer sociable, « sociabiliste » si l’on veut porter cette vertu au niveau d’une méthode de travail.

Alors que la dialectique consiste dans l’exacerbation des contraires, le sociabilisme consiste en la recherche systématique des points de rencontres, ce que Jean Ousset appellait, en la mettant au point, « la méthode des recoupements ». Elle consiste à rechercher les points sur lesquels des personnalités se référant à des systèmes de pensée différents se recoupent. Il n’est pas question, par là, de gommer les points de désaccord. Il s’agit simplement de montrer que s’il existe des intersections possibles entre des systèmes opposés, sinon irréductibles, c’est parce qu’il existe des vérités fondamentales, des vérités essentielles, à ce point gravées dans le réel qu’on ne peut les nier. Ces vérités n’étant que le reflet de cet ordre naturel qu’on met en doute aujourd’hui alors qu’il est incontestable.

Ce qui suppose « qu’on s’attache à rechercher non seulement dans l’actualité, mais aussi dans l’histoire, ces « invariants » dont parle Thibon, les « permanences ». C’est ça le sociabilisme : savoir dépasser les divergences, aller au-delà pour se retrouver sur l’essentiel, sur des normes fondamentales, des notions qui transcendent tous les clivages » (28).

Notre action, c’est de « restaurer concrètement les sociabilités anciennes » et d’inventer des sociabilités nouvelles. Ce qui revient à prendre le contrepied de la méthode révolutionnaire, de la méthode dialectique.

Charles Rambaud, animateur culturel, qui parle donc en connaissance de cause, affirme d’expérience : « Partout où l’on arrive à recréer un peu de sociabilité, on prive le levier dialectique du point d’appui sans lequel il devient inopérant ».

A une personne qui demandait quelle était l’arme absolue contre la méthode dialectique employée par le communisme international, Philippe Robrieux, ancien membre du Comité central du Parti Communiste français [[Philippe Robrieux a rompu avec le PC sur lequel il a écrit un livre essentiel, « La Secte ». En vente au CLC.]], répondit : « L’arme de l’avenir, je ne la connais pas. Je ne suis qu’un historien. Ce que l’historien peut seulement vous dire, c’est ceci : plus il y a de sociabilité, moins il y a de déstabilisation. Moins il y a de sociabilité, plus il y a de déstabilisation ».

Dans le patrimoine culturel d’une nation résident toutes les possibilités de retrouver les grandes lignes de force qui permettent de penser et de vivre ensemble, avec des inflexions différentes, avec toutes les nuances et les particularités de chacun. Autant la guerre culturelle conduit à une uniformisation des modes de pensée, autant notre action reconnaît la diversité, voire les contrastes et les oppositions, mais privilégie la rencontre et la communion.

La culture : un style de vie à partager

Ce n’est que par cette méthode sociabiliste que nous parviendrons à faire de la culture non un ensemble de principes à contempler, mais un style de vie à partager.

La guerre culturelle progresse moins par la diffusion d’erreurs clairement formulées que par celle d’un climat corrupteur qui, de manière insidieuse, impose un langage, un comportement, des moeurs… contre lesquels la rigueur des idées est de peu d’effet. C’est donc à la diffusion d’un certain état d’esprit, d’un certain climat que nous devons nous attacher par priorité.

« Notre action, ce n’est pas seulement de conquérir et de former quelques chefs, c’est aussi d’évangéliser les pauvres (…), ce qui signifie que les idées fécondes, vraies et salutaires, dont nous avons appris le magnifique enchaînement cohérent, doivent quitter les bibliothèques et les salons pour devenir partout, et surtout dans la rue, les idées qui sont dans l’air », disait Jacques Trémolet de Villers dans un éditorial de « Permanences »

La guerre culturelle se livre maison par maison, famille par famille, personne par personne. Notre action culturelle doit procéder de même.

Elle doit passer d’abord par les familles qui sont le socle de la renaissance nationale et qui ont naturellement une vocation à transmettre la culture; puis par tous ces médiateurs naturels que sont : l’école (terrain béni de la guerre culturelle), l’université, l’atelier, l’usine, la paroisse…

La seule action féconde et durable est celle qui respecte l’ordre de ces médiateurs naturels dont la plupart sont des corps intermédiaires [[Les corps intermédiaires, ce sont les milieux professionnels, associatifs, culturels, dits intermédiaires parce qu’ils sont entre l’Etat et la famille, cellule de base de la société. Ce sont les communautés sur lesquelles repose, ou du moins devrait reposer, la société.]].

« Les valeurs éducatrices d’une civilisation, écrit Gustave Thibon, ont besoin essentiellement de passer par le canal du contact immédiat de prochain à prochain, par le canal de l’exemple, par le canal de l’incarnation. Elles ont besoin de constituer un climat, une ambiance, une imprégnation souvent inconsciente. (…) Le climat, l’ambiance où nous vivons (…), c’est quelque chose de très important, presque d’irrationnel ».

A ce propos, il raconte une anecdote : un homme auquel on offre une place intéressante mais exigeant de lui des détournements de fonds, des actions malhonnêtes, refuse. Il a pourtant besoin d’argent et a peu de scrupules moraux. Gustave Thibon lui demande la raison de son refus et l’homme répond : « C’est mon grand-père en moi qui a refusé ».

Ce qui veut dire que l’ambiance pénètre l’homme beaucoup plus qu’on ne le croit. Selon Gustave Thibon, il n’y a pas seulement un inconscient des « bas-fonds » , où règnent les complexes, les refoulements…, mais aussi un inconscient des « profondeurs », une influence qui va bien au-delà du rationnel. « La culture doit etre mêlée à la vie comme le sel est mêlé à la mer ». Par nature, cette imprégnation culturelle est lente et diffuse, mais elle est la clé de la reconstruction de l’unité d’un pays.

Ce n’est que de cette façon que pourra se recréer un consensus dont on a dit qu’il était primordial pour l’orientation d’une société et à la base du renouveau de notre patrie.

Là réside également la clé du problème de l’immigration, car la société « multiculturelle » est une imposture.

Aucune société ne peut se constituer ni se développer en dehors de la conscience d’un destin commun à chacun de ses membres. Si les Français ne savent plus ce qu’il y a de grand, de noble, de respectable dans leur histoire et leur patrimoine, comment les immigrés le sauraient-ils et comment auraient-ils envie de s’intégrer dans notre pays, de l’aimer, de le servir ?

Le rétablissement de ce consensus culturel et de la conscience d’un « nous commun » est aussi le seul barrage possible aux totalitarismes. La culture est un garde-fou contre les totalitarismes. Jean-Paul II n’a cessé de répéter que « la Pologne avait conservé son identité, non en s’appuyant sur les ressources de la force physique, mais en s’appuyant sur sa culture » [[Discours à l’Unesco, 2 juin 1980.]].

Enfin, c’est en instaurant un consensus autour de notre trésor culturel qu’il est possible de recréer le tissu culturel indispensable à l’épanouissement de nouveaux talents. Car la connaissance et l’amour des talents passés seraient à peu près vains s’ils ne permettaient pas d’en faire surgir de nouveaux, héritiers des précédents et artisans de l’avenir. Charles Rambaud estime, à juste raison, qu’ »un amour et une connaissance du passé qui ne débouchent pas sur la création de formes nouvelles ne constitue que la manifestation la plus stérile de la nostalgie ».

Il ne s’agit pas de recopier la culture ancienne, il s’agit de s’imprégner de l’esprit qui s’en dégage et de le perpétuer. Et ce, en utilisant toute la modernité technique et artistique de notre époque. Pensez au spectacle du Puy-du-Fou qui intègre les possibilités qu’offrent les techniques de notre temps tout en puisant dans l’histoire et la tradition.

L’action culturelle que nous proposons répond aux désirs des Français. Le nombre est plus grand qu’on ne le croit de braves gens qui sont plus victimes que coupables des erreurs qu’ils professent. Le divorce entre la culture et le public tient au fait que la sous-culture officielle n’apporte plus aux hommes la satisfaction d’un désir essentiel, celui d’admirer, de s’émerveiller, de se sentir tout près du Beau.

Ainsi que le souligne Charles Rambaud, « il est temps de comprendre que les hommes ont besoin, sans bien même le savoir tant ils en sont privés, non d’un programme politique mais d’une chanson qui entretienne leur espérance ou apaise leur peur, d’un poème qui les aide à voir clair dans la nuit de leurs jours, de fêtes et de spectables par lesquels ils retrouvent leur appartenance à un peuple, d’une danse qui réveille en eux le jeune Icare endormi ».